jeudi 15 janvier 2009

Où il est question d'Elfaouara et d'Hollywood




EL FOUARA : IL SUFFISAIT DE L’EVOQUER !


L’article précédent (voir article du 25/10/08 intitulé fawara de notre enfance) ne précisait pas assez qu’El Fouara était un ouvrage qui ne suggérait aucune connotation politique ou religieuse, mais une simple fontaine publique conçue sous la forme d’un obélisque s’intégrant dans des proportions harmonieuses avec la configuration du site d’antan. Sa forme architecturale n’inspirait aucune idée iconoclaste. Au lendemain de la guerre, on avait peut être envisagé de la remplacer par quelque chose de plus glorifiant pour la révolution et les sacrifices consentis par le pays.Au lieu de la conserver telle quelle, sinon la considérer comme un butin de guerre qu’il fallait préserver en attendant de disposer d’une alternative plus adaptée à l’avènement de l’indépendance fraîchement acquise on avait confié le projet à une équipe qui n’a pas eu la main heureuse. Elle avait malencontreusement précipité la démolition. Depuis plusieurs agencements du site ont été proposés mais aucun d’eux n’a réussi à combler le vide laissé par la disparition de ce monument.
En abordant ce sujet certains ont vite prétendu que cette fontaine, dont l’image est demeurée indélébile dans le cœur des anciens de Bou-Saâda, signifiait peu de chose aux yeux des nouvelles générations. Les plus âgés s’imaginaient en secret être les derniers nostalgiques à ressentir encore son aura et à se représenter son image qui n’a jamais quitté les lieux malgré un demi-siècle depuis sa destruction. La réalité a démontré que si ses contemporains ne pouvaient rester indifférents à sa souvenance, ceux qui ne l’ont jamais connue manifestent un vif intérêt, voire de l’impatience pour son retour. Il a suffit d’une simple évocation parue simultanément dans deux quotidiens nationaux pour que sa magie opère et des personnes de toutes conditions viennent s’informer de quelle manière elles pourraient être utiles et s’il y avait une souscription pour une contribution financière et technique.
Un heureux concours de circonstances a donné une portée et un écho inespérés à un article de presse des plus anodins auprès des lecteurs et surtout des Autorités locales qui ont ainsi démontré combien elles peuvent être sensibles à tout ce qui concoure à améliorer l’environnement de leurs administrés.
Avec une rapidité franchement insoupçonnée ces dernières ont saisi au vol l’occasion de formaliser une idée et l’ont intégrée judicieusement à un plan de travail déjà entrepris dans le cadre de l’embellissement du cadre de vie.
Alors que les anciens discutaient avec âpreté de l’emplacement exact où se trouvait l’ouvrage en pariant sur la fidélité de la mémoire, les jeunes essayaient de suggérer d’autres modèles ou d’introduire quelques variantes sur l’original tout en supputant sur la forme achevée.
L’honneur de servir la grande dame est cependant revenu…..aux représentants de l’Empire du milieu que le hasard a fait traverser des milliers de kilomètres pour immortaliser leur passage dans la région par la reconstruction bénévole de cet ouvrage. Titulaires de plusieurs projets dans la région, ils nous offrent gracieusement la réalisation de cette fontaine. La ville ne peut rester insensible à la beauté de ce geste et les en remercie
Les jeunes loups des services hydrauliques auxquels a été confié le suivi du projet ont, en un tour de main, ficelé l’aspect ingénierie. Pour marquer leur contribution d’une touche personnelle ils ont inclus des « options » très utiles, entre autre l’installation d’un réservoir d’eau au milieu de l’ouvrage et son adduction à la conduite d’eau potable, alors que le cœur de l’original ne remplissait aucune fonction. L’installation d’un système de jets d’eau avec son jeu de lumière nocturne est prévue. Leur équipe, dans un souci d’utiliser le matériau originel, est allée jusqu’à prospecter dans la région pour retrouver la carrière d’où étaient extraits les premiers blocs qui avaient servi à la construction de jadis. La pierre qui va habiller l’ouvrage sera donc de la même veine. La taille et le calibrage sont assurés par les artisans chinois.
A mesure que l’ouvrage prend forme, l’engouement de la population augmente. Le nombre de curieux s’accroît avec l’évolution des travaux lancés le 12 Décembre 2008 par une équipe de l’entreprise Chinoise « SINOHYDRO »
Outre son aspect ornemental cet édifice, qui va se réapproprier son rôle de pivot d’une ville actuellement désaxée par des démembrements fuyant dans tous les sens, va meubler et agrémenter la monotonie d’un espace tristement sans âme. La valeur affective de la réalisation et surtout son incidence sociologique viendrait opportunément stimuler la dynamique naissante de faire recouvrer à la ville son cachet convivial d’autrefois.
Oui BOU-SAADA est sur la bonne voie pour récupérer et restaurer les joyaux de son patrimoine longtemps délaissés et livrés au vandalisme ajouté à l’usure du temps et au manque d’entretien encouragés par l’incurie. Plusieurs associations œuvrant pour la promotion des activités culturelles se sont attelées à la réhabilitation de tous les sites qui constituaient des référents culturels de la région. Le meilleur des présages s’est concrétisé par le lancement de la reconstruction effective d’El Fouara grâce à la remarquable disponibilité rencontrée chez les responsables locaux .On aimerait tant rencontrer plus souvent ce genre d’écho auprès de nos dirigeants même si eux aussi peuvent se retrouver des fois englués dans la gangue bureaucratique. Quant aux habitants de Bou-Saâda, leur satisfaction est telle que personne ne peut honnêtement ne pas reconnaître et estimer à juste titre le geste élégant des dirigeants de la Wilaya et surtout la célérité avec laquelle la décision de reconstruire ce monument a été prise. La meilleure manière de confirmer ce que veut dire l’écoute attentive des préoccupations des citoyens vient ainsi d’être magistralement administrée.
Beaucoup de projets d’utilité publique sont en cours de réalisation alors que d’autres encore plus passionnants sont en voie d’être lancés. Avec une disposition et une volonté comme celles que nous venons de découvrir et d’apprécier chez des responsables de cette trempe, nous pouvons parier que le train des réaménagements est déjà sur rails. Bordj Essâa, Moulin Ferrero, les berges de l’Oued, la réfection des vieux quartiers, le plan de circulation et les autres sites touristiques ont toutes les chances de quitter le gouffre abyssal des promesses habituellement sans lendemain.
D’ailleurs, l’engagement spontané du Wali qui fait assurer le suivi de l’évolution des travaux par son Secrétaire général, le Chef de Daïra et le P/APC est très apprécié par la population de la ville agréablement surprise. Tant de quêtes infructueuses et de déceptions l’ont habituée à une administration autiste et frileuse à toute velléité d’amélioration sollicitée par tout citoyen étouffé par l’absence de perspectives. Le laxisme et l’absence de goût ont favorisé l’anarchie urbanistique dont les préjudices sur les repères distinctifs, voire l’identité de la ville sont incommensurables. Le cachet particulier qui faisait la fierté des autochtones et surtout l’émerveillement sincère de leurs hôtes a été galvaudé dans la médiocrité entraînant avec lui toutes les spécificités culturelles de la région.
Connue pour sa douceur de vivre et ses trésors naturels que beaucoup d’artistes ont immortalisés dans leurs œuvres, à commencer par le fameux Dinet, Bou-Saâda s’est laissée glisser graduellement vers l’image peu amène d’une ville sans âme et sans aucun attrait avec son magma de béton informe.
Les gens de cette ville n’ont jamais été des Crésus, ils savaient se satisfaire de peu. Leur fortune était impérissable parce qu’elle se confondait avec leur joie de vivre. Apprécier chaque instant de l’existence comme un don de Dieu constituait un trait spécifique de la plupart d’entre eux quelques soient les soucis du quotidien. Leur optimisme est tellement communicatif qu’aucun des membres de cette communauté ne pouvait ressentir la solitude en face de l’adversité. Aussi loin que l’on se souvienne personne ne s’est jamais plaint des affres de l’indifférence ou de l’absence de solidarité au pays de Sidi Thameur. Cette nature si simple et hospitalière a fini par séduire de nombreux voyageurs qui s’y sont installés définitivement après leurs nombreuses pérégrinations.
Parmi les artistes qui ont été subjugués par le charme de la région, des cinéastes de renom tels Cécile B.de MILLE, M.L HAMINA et d’autres non moins célèbres, fascinés par les différents panoramas qu’offre la région y ont tourné plus d’une cinquantaine de films. La nature n’a pas été avare au point d’offrir sur le même lieu tous les sites naturels qu’on peut imaginer. Du paysage lunaire et l’erg saharien écrasé par un soleil de plomb aux étendues sablonneuses .Des mirages de la sebkha aux cèdres enneigés en hiver en passant par des îlots de végétation luxuriante .La couleur irisée de ses montagnes au coucher du soleil a quelque chose de féerique qu’aucune palette d’artiste n’a pu saisir. Plusieurs extérieurs de films y ont été tournés et tout la prédestinait à devenir le petit Hollywood algérien. On avait même ébauché la construction d’un village mexicain pour les besoins des films western. Un projet ambitieux avait germé à l’époque dans l’esprit de quelques amoureux du grand écran pour l’aménagement des sites de tournage et l’installation de studios. La résistance au changement confortée par les préjugés et l’intolérance véhiculés par les nouveaux puritains contre l’art cinématographique a trouvé un soutien dans l’absence d’une législation attractive et le manque d’audace pour développer ce secteur en encourageant la coopération internationale. On laisse même croire à l’existence d’une contre publicité pour dépouiller la région de cette perspective. Malgré tous ses atouts naturels Bou-Saâda avait ainsi raté l’occasion de devenir un des principaux sites de production cinématographique.
Avec le potentiel d’intellectuels qui ferait l’orgueil de n’importe quelle autre ville, ce que nous constatons aujourd’hui a de quoi insuffler le plus prometteur des optimismes quant à la mobilisation des efforts nécessaires pour remporter la bataille contre la médiocrité . L’exaltante expérience que nous vivons nous enseigne qu’il suffit de s’accrocher à des objectifs rationnels et d’y croire. Pour cela il faut peut être fédérer toutes les bonnes volontés à commencer par celles des autorités locales qui viennent de nous démontrer qu’elles peuvent être très attentives et que la balle n’est pas toujours là où on a l’habitude de la situer pour se dérober à ses obligations mais bel et bien à la portée du plus déterminé.
En conclusion nous tenons à manifester notre gratitude pour leur magnifique contribution à Mr le Wali de la Wilaya de M’sila, Mr le Secrétaire Général de la Wilaya, Mr le Chef de la Daïra et l’APC de Bou-Saâda, l’Entreprise Chinoise SINOHYDRO, l’Equipe de l’Hydraulique sans oublier les journaux ElWatan et le Quotidien d’Oran pour la publication simultanée de l’article qui a permis la réalisation de cet objectif
Amara KHALDI

2 commentaires:

benaziez a dit…

Un rêve qui devient réalité. Il faut dire que l’opération de destruction d’el fouara fut un acte de spoliation et ce jour beaucoup de personnes ont suivi la mort dans l’âme la disparition de ce monument. A cette époque où nous vivions les premiers moments de la liberté et la frénésie de l’indépendance, les consciences ne pouvaient s’opposer aux idées fortes et pressantes de cette période. Après le départ du colonisateur Il ne nous venait pas à l’esprit de s’interposer à la disparition de tout symbole qui peut nous rappeler la période coloniale. La tendance avait valeur de jugement et l’esprit critique ou visionnaire ne pouvait exister en ces moments de grande joie et de flottement. Voilà ! Des décennies après, le temps ou plutôt la mémoire prennent leur revanche. Je joints ma parole à celle de notre ami Amara Khaldi pour encourager de pareilles initiatives consistant en la restauration du patrimoine de Bou-Saâda. Nous remercions nos responsables locaux qui ont compris que la ville sans ses repères et ses monuments est une cité sans âme.

anis a dit…

tres bonne initiative que celle prise par les responsables locaux pour la rehabilitation d'el fouara.toute une generation de bou-saadiens ont revu ce monuments avec une nostalgie perdue et retrouvee .
vous remerciant monsieur amara khaldi pour l'article et autres initiatives .
heureusement qu'il ya des gens qui travaille a l'ombre pour la survie du patrimoine touristioque de bou-saada